Dans les terres désolées de Norvège, un homme avançait debout, contre le vent et la neige. Minuscule point noir dans l'immensité immaculée, il luttait pour se tenir debout, la peau brûlée et les cheveux arrachés. Devant les murailles de Bergen, la silhouette continuait d'avancer alors que le ciel explosait en des myriades de couleurs. La nuit était avancée et pourtant, l'on voyait comme en plein jour. Lorsqu'Azildur pénétra dans l'enceinte de sa cité, les murailles s'animèrent, comme la Cour et plus loin, le Donjon. Partout, des soldats à l'air lugubre défilaient en silence, aux yeux morts et à la peau translucide. Frappés du sceau de la famille Azildur, ils semblaient revenir d'outre tombe.
C'est alors que le seigneur tomba finalement à genoux, terrasé par la fatigue. Après avoir traversé ces déserts de glace, il ne pouvait plus, ne souhaitait plus continuer. Tous lui avaient tourné le dos. Il avait tout perdu.
Alors qu'il s'effondrait, de puissants bras le ceinturèrent et le relevèrent. Croyant rêver, Azildur poussa un cri lorsqu'il découvrit le monstre qui le tenait. Plus grand que le plus grand des hommes qu'il connaissait, ce dernier avait un visage rouge sang, et rouges étaient ses yeux. Sa peau n'était que lambeaux de chair et ses cheveux n'étaient que des fils transparents. Ses dents en revanche, étaient étincelantes quand sa bouche s'ouvrit sur un ricanement infernal.
"Mon fils, quel plaisir de te voir ici, à la fin de toutes choses. Je commençais à croire que jamais tu ne t'ouvrirais au désespoir. Ne prends pas cet air paniqué, car tu sais pertinemment qui je suis. Je suis toi, et tu es moi. Je suis l'esprit damné de ta famille, celui que Philippe de Gotland a rapporté de ses premières conquêtes. Je suis celui de Baybars al Bunduqdari, je suis celui d'Octave, Doge de Venise, je suis celui d'Oktavus le Rouge, et d'Osvald Haraldsson. Je suis celui que Chaos a déchaîné sur l'Europe, celui que Dahlia a tenté d'enfermer. Je suis Azildur. Le jour où tu es né, nos destins se sont enchaînés. Jamais ta famille ne doit connaître le repos, mais en échange, ton âme ne va pas brûler pour rien. Car tu recevras les pouvoirs du Chaos et les Légions Fantômes seront tiennes. Elles ne craindront nulle douleur, nulle mort, car elle leur a déjà été offerte. Ne fais plus qu'un avec moi, Azildur, et tu vaincras. Lève l'épée que tes aïeux ont forgé, et transperce tes ennemis. Souviens toi, ta lignée a toujours régné avec force et honneur. Et je sais que tu rempliras ta part du marché : déverse des flots de sang sur cette Terre et alors, le pouvoir du Dieu de la Mort sera à toi ! En avant !"
Et toutes les couleurs du ciel semblèrent exploser au centre de la Cour alors que le seigneur de Bergen disparaissait dans un tourbillon de glace. Lorsque le calme revint, nul bruit ne perçait plus de la cité. Nulle lumière ne perçait plus les ténèbres désormais totales. Mais au sommet du Donjon, Azildur dominait la lande. Emprisonné dans une armure en acier noir, il sentait ses mucles, il contemplait sa taille et sa puissance nouvelle. Oui, son âme était désormais promises aux ténèbres. Mais il pouvait léguer bien plus que cela à son descendant. Car il le savait, désormais, puisqu'il ne pouvait plus craindre la mort, il en serait désormais son Messager.
Car chaque homme des Légions fantômes allait se battre comme cent.