Un étrange rêve

Guronce de Lix · 18/05/2014 08:29:30

Le jeune seigneur s'éveilla, le front barré d'une marque d'inquiétude.

Comme il seyait, plusieurs domestiques s'empressèrent d'avertir les membres de la Cour de ce réveil - la réunion d'un Conseil était de mise maintenant que le Roy Kalan, dont la maladie n'était plus un secret depuis longtemps, avait fait part de son intention de céder le Trône.

Lorsque les Lords les plus influents furent assemblés, le Grand Chambellan fit part de l'ordre du jour. La principale préoccupation du jour était le très faible nombre de seigneurs concourant pour la succession de leur monarque. À la surprise de tous en effet, Kalan avait rompu avec la tradition et n'avait pas attendu que trente prétendants fussent sur les rangs.

Mais Guronce l'arrêta et leur dit à tous :

"Mes chers frères, avant que de commencer, laissez-moi vous parler du rêve que je fis d'Europe."

"Mon rêve semblait fort réel malgré le caractère invraisemblable de ce que j'y vis. Des seigneurs importants décidaient ensemble du destin de l'Europe. Ils portaient d'étranges tenues comme aucun pays n'en conçoit, fut-ce aux confins de l'Asie. Mais deux choses étaient plus surprenantes encore - aucun ne portait d'épée ou même un simple poignard. Et dirai-je même, beaucoup de ces seigneurs étaient des femmes !"

"Diable, s'écria alors lord Mountbatten, ce que vous vites la n'était il pas plutôt un conclave de domestiques et de soubrettes ?"

"Non pas, répliqua Guronce, il s'agissait bien des seigneurs de l'Union Européenne, et ils réglaient leurs problèmes dans la paix et la négociation, respectant la paix et l'harmonie. La force de leur Union ne provenait point du sang versé de leur ennemis, mais de la richesse de leur économie et de l'inventivité de leurs artisans. Dirai-je encore que dans ce rêve, qui était comme une vision de l'avenir, ces artisans étaient si talentueux qu'ils avaient même bâti des machines volant dans le ciel telles des oiseaux !"

"Eh bien, interrompit alors Lord Mountbatten, on peut craindre alors que ce rêve ne ressemble que fort peu à l'Europe à feu et à sang que nous allons connaître !

"Non point, mon fidèle ami. Car je ne vous ai point raconté ce rêve pour vous divertir, mais au contraire pour vous proposer de construire ensemble cette belle vision de paix. Je voudrais, mes loyaux Lords, que l'Angleterre soit le berceau d'une Europe lumineuse et harmonieuse, et c'est pourquoi l'on voudrait que l'on me retienne à l'avenir comme Guronce le Lord Diplomate Européen."

Un silence s'ensuivit qui laissa l'assistance troublée. La lignée des Guronce était habituellement celle de seigneurs solides et habiles, sachant conduire leurs terres tantôt vers le succès, tantôt à tout le moins vers une mort honorable et glorieuse dont nul ne saurait rougir. Pourtant, de temps en temps, un original se glissait parmi ceux-ci, et chacun avait en tête les Guronce voyageurs qui tous deux avaient échoué dans leur démarche démente. Le jeune seigneur qui avait pris les rênes de Dyffed en faisait-il partie ?

de Saint Aignan · 18/05/2014 21:31:47

C'est dans sa riche demeure, confortable mais pas ostentatoire, qu'Athys de Saint Aignan, le prince de l'Achaïe, prit connaissance de la geste du dernier des Guronce. Dans sa baignoire qui donnait, par un pan de mur ouvert, sur une baie d'une eau si bleue qu'elle n'existe qu'en Grèce, il songea en son fort intérieur.

"Cette idée d'une europe de paix où chacun aurait son mot à dire est des plus étranges. Ce genre d'idée est dangereuse : le premier manant venu pourrait s'imaginer qu'il a son mot à dire sur sa destinée voire - soyons fous- sur la gestion des fiefs.

D'un autre coté, si chaque nation apportait ce qu'elle avait de meilleur, pour le bien commun, quelle oeuvre grandiose on pourrait ainsi obtenir..."

C'est donc fort d'une résolution neuve et déterminée que le Prince de l'Achaïe fit porter la candidature des Grecs à cette idée d'Europe. Tout le savoir faire grec en matière de finances profiterait ainsi à tous ...

Guronce de Lix · 20/05/2014 08:19:50

"Alleluia !" s'écria Guronce, et sa joie résonna dans tous le Palais.

"Alléluia, il se trouve donc au moins un seigneur prêt à bâtir l'Union Européenne, et à en faire déclaration publique ! Je vous le dis mes amis, cela prouve que je ne suis point dans l'illusion, et qu'une telle Europe est possible."

"Voyez que j'ai imaginé une trouvaille propre à fédérer tous les peuples d'Europe, et à édifier avec sagesse les lois qui permettront la prospérité de tous. Lorsque l'Europe sera revenue en paix, dans le respect des frontières de chacun, nous bâtirons un Parlement et chaque citoyen de cette Europe pourra y élire ses représentants, qui discuteront entre eux et décideront la loi qui s'appliquera à tous."

Lord Moutbatten toutefois, arborant une fois encore sa mine renfrognée propre à décourager les élans les plus nobles et les plus inventifs, demanda à intervenir :

"Mon bon sire Guronce, j'admire votre idéalisme, mais je pense que vous faites ici fî de la nature même du gueux, en voulant penser qu'il pourra voter afin de faire les lois. Je vous le donne même en cent que, si par absurde votre idée aboutissait, la moitié des manants, mûs par la paresse, l'indécision ou l'ignorance, ne feraient même pas l'effort de se déplacer pour placer un bulletin dans l'urne, quand bien même ils sauraient lire ce qui, vous l'accorderez, est déjà en soi une impossibilité."

Cette possibilité noire et effarante, que Guronce ne pouvait hélas pas écarter absolument, en connaisseur de l'âme humaine, troubla le Lord Diplomate Européen.

Mais, rejetant cette idée noire, il décida qu'il fallait saisir le moindre fétu de paille au service d'une Noble Idée.

"Vous avez peut-être raison, Lord Moutbatten, mais l'usage mal à propos de notre belle idée qu'un manant pourrait faire dans huit siècles ne doit point nous détourner de faire le Bien en ce jour."

Et, saisissant sa plume, il rédigea à l'intention du seigneur Athys d'Achaïe, prince de Grèce, grand financier émérite et ami de l'Idée Européenne, une proposition de traité d'alliance et d'amitié.

Dernière modification par Guronce de Lix (20/05/2014 08:21:11)

Calydan · 21/05/2014 17:14:30

C'est depuis son palais en Ile de France, entre deux réunions du conseil restreint servant à développer le royaume, que le seigneur Calydan, protecteur des Francs, était en pleine réflexion de ce fameux projet de paix et d'union.

"Former une Union Européenne, quel drôle d'idée. Et pourtant, aussi drôle et inattendue quel soit, cette idée est toute de même à prendre en compte.
De son caractère inovant, elle peut apporter une conception de nouveauté qui manque cruellement au sein de l'Europe. Une nouveauté qui pourrait apporter une ère de prospérité, d'échange, de découverte et d'évolution.

De plus, la paix coûte réellement moins chère que la guerre alors pourquoi ne pas laisser une chance à cette idée de naître et de se développer ..."

Et c'est une fois le conseil fini, que Calydan, protecteur des Francs, envoya une missive au seigneur Guronce, son voisin anglois, pour lui faire savoir qu'il souhaite contribuer à ce projet d'Union Européenne et toutes les ressources des Francs seront mises à contribution pour sa réussite.

Azildur · 21/05/2014 17:37:01

Dans les steppes infinies battues par les vents glaciaux venus de Sibérie, une véritable marée humaine progressait à son rythme. La Horde d'Or oui, mais également tout son peuple avançait paisiblement vers les terres fertiles et riches de l'Europe, bastion des grands Normands, bâtis dans le fer qui avaient terrassé les Faucons Arabes tant de fois. Pourtant vaincus mais jamais envahis, les Européens continuaient de diriger le monde depuis leurs riches châteaux et leurs manières qu'ils voulaient civilisées.

Dans cet océan de visages burinés par le vent et la poussière d'Asie, tous allaient avec sérénité et patience, à l'image de leur khan suprême, Ögödei Khan, qui avait mis à feu et à sang les pays de l'Islam avant de se tourner vers son destin impérial : la Russie. Son frère Djötchi lui avait montré la voix, voilà bien des années auparavant, avant son décès. Aujourd'hui, il était héritier de la Horde d'Or et responsable du destin des Ilkhanides. Les petits princes désunis avaient fui devant les cavaliers mongols et la paix chérie s'était naturellement couchée devant l'avancée de la Horde.

C'est dans son palais mongol, fait de soie et de tout ce qu'il y avait de plus rustique qu'une tente que le khan, le chef suprême de Turov et d'Asie reçu la nouvelle portée par les vents du Nord. Ainsi donc, un original de plus se dressait parmi les Francs, comme les appelaient les Arabes avec leurs sabres éffilés et leur haine farouche pour ces descendants de croisés qui avaient fait main basse sur les richesses du Levant.

Ögödei avait reçu, comme chacun de ses prédécesseurs avant lui, un prélat de Rome qui lui avait longuement comté les richesses que l'Eglise était prête à céder à la Horde en échange de la promesse de la cessation des attaques contre les chrétiens. Et Ögödei ferait la même réponse à ces doux rêveurs barbares qui désiraient une paix à moindre frais. Non, il devait montrer la voie à son peuple et conquérir un Empire lui aussi. Alors le rêve de son père Gengis serait accompli et le Soleil ne se coucherait jamais sur l'empire mongol.

"Va, Kubïlaï, et fais leur connaître le bruit de nos sabots sur la terre, le goût de la cendre portée par le vent et la couleur de leur sang répandu sur la terre. Fais leur connaître la peur et la violence, la mort et la gloire. Alors nous aurons une paix oui, notre paix mongole".

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